La clause de Conditions de Garantie liée au risque cyclonique en matière d’assurance Navigation Plaisance : Une refonte indispensable.

Mal nécessaire selon certains et pourtant condition indispensable de la navigation de plaisance, la souscription d’un contrat d’assurance dit « Navigation Plaisance » fait partie des obligations auxquelles tout plaisancier doit se soumettre lorsqu’il acquiert le bateau de ses rêves, et ce quels que soient sa marque, son modèle ou son gabarit.

Lors de la survenance d’un sinistre, le plaisancier, qu’il soit de bonne foi ou pas, n’échappe pas aux vicissitudes, discussions et interprétations dont le droit des assurances est coutumier.

Parmi les clauses habituelles du contrat d’assurance Navigation Plaisance, il s’en trouve une qui doit requérir une attention toute particulière de la part du plaisancier : la clause de Conditions de Garantie liée au risque cyclonique, la plupart du temps insérée dans les extensions contractuelles des limites de navigation appliquées à la Zone Antilles.

Distincte de la clause d’Exclusion de Garantie visant à exclure du bénéfice de la garantie une circonstance particulière de réalisation du risque (faute intentionnelle de l’assuré, zones de navigation, course en mer, location…cf. 1ère civ. , 26/11/1996, pourvoi n° 94-16.058, Bull. 1996, I, n° 413.), la clause de Conditions de Garantie, cyclonique ou autre, s’entend, au terme de la définition qu’en donne la Cour de Cassation, comme une mesure de prévention du risque mise à la charge de l’assuré et qui affecte l’obligation de couverture de l’assureur, préalablement à la réalisation de tout risque (Cass. 1re civ., 23 févr. 1999, n° 96-21744, publ. Bull. civ. ; Cass. 2e civ., 3 févr. 2005, n° 03-19624 ;- 30 juin 2011, n° 10-23309. 2e Civ., 16 décembre 2010, pourvoi n° 09-69.829).

La clause de Conditions de Garantie a en effet été définie progressivement et de façon imparfaite par la jurisprudence, puisqu’elle n’est précisée par aucun texte au contraire de la clause d’exclusion de garantie qui l’est par l’article L. 113-1 du code des assurances.

Bien qu’elle n’ait pas à être formelle et limitée comme la clause d’exclusion de garantie et que ses critères de lecture soient encore difficiles à déterminer, elle doit néanmoins être claire et précise afin que l’assuré connaisse avec exactitude l’étendue du risque assuré, prohibant de facto le recours de l’assureur à des notions floues voire indéterminées. (Cass civ 2ème ; 16 décembre 2004 et Cass. civ. 2ème, 20 octobre 2016)).

Cette exigence de prévisibilité et la nécessaire précision qui doit être apportée à la rédaction de ces clauses est d’autant plus essentielle qu’aucun lien de causalité n’est exigé entre la condition de garantie et le sinistre.

Tel n’est pas toujours le cas en matière de risque cyclonique, créant ainsi une insécurité juridique au détriment de l’assuré qui pourra se voir opposer un refus de garantie au prétexte que les conditions de la garantie, exprimées pourtant de façon floue, générale et imprécise, n’auraient pas été respectées.

Les clauses de Conditions de Garantie insérées dans la Clause Cyclone des contrats d’assurance de navigation de plaisance listent l’ensemble des mesures que doit prendre le plaisancier assuré pour mettre son bateau en sécurité et minimiser, avant le passage du cyclone ou de l’ouragan, les dommages susceptibles de survenir et les frais en découlant.

Figurent au nombre de ces mesures, sans que la liste soit exhaustive et en fonction des contrats d’assurance : le renforcement de l’amarrage de l’unité, la protection des bordés du bateau, le brêlage des défenses, le retrait du pont des objets pouvant offrir une résistance au vent (tauds, voiles, lazy bags, pâle éolienne, annexe), l’amarrage de la bôme, le ferlage de la grand-voile, le dégonflage et le pliage de l’annexe gonflable, le placement des survies et des moteurs dans un coffre à l’intérieur du bateau, le stockage à terre de l’annexe rigide ou semi rigide, le démontage des objets de valeur (électronique), la fermeture des vannes de coques…

Pour autant, ces stipulations, de par leur caractère trop général et parfois inadapté à tel ou tel type de navire, contraignent le plaisancier assuré à les interpréter afin de les rendre efficaces et réalisables sur son bateau.

Interprétation qui ne va pas toujours dans le sens entendu par l’assureur, comme en atteste l’important contentieux né à ce sujet suite au passage du cyclone IRMA qui a dévasté l’île de Saint Martin en 2017.

Les assureurs, pour refuser leur garantie, ont souvent fait une interprétation de cette clause différente de celle qui en avait été faite par l’assuré, tout en estimant que la clause était suffisamment claire et précise pour trouver à s’appliquer.

Si ce débat existe et nourrit le contentieux, c’est bien parce que les clauses de Conditions de Garantie cyclonique, édictées par les assureurs, ont tendance à être rédigées de façon trop générale afin de pouvoir s’appliquer à tous les types de bateau, sans tenir compte, notamment, d’un amarrage spécifique (cul à quai, entre des catways ou bord à quai) lorsque le bateau se trouve au port ou dans une marina.

À titre d’exemple, lorsque l’assureur évoque le triplement de l’amarrage au port sans préciser de quelle façon il doit être effectué (à savoir sur le même taquet, sur des taquets différents, ou sur des points d’ancrage supplémentaires), ou encore lorsque la clause stipule seulement qu’il doit s’agir d’aussières appropriées sans préciser leurs dimensions, leur nature ou leur qualité, il laisse prise à une nécessaire interprétation de l’assuré et ouvre par voie de conséquence la porte à une divergence d’analyses susceptible d’occasionner un refus de garantie.

Il en va de même pour la mise en sécurité des matériels et équipements, tous différents et spécifiques en fonction du type de navire, qui ne peut se faire de façon uniformisée.

Les préconisations de l’assureur sont même parfois de nature à créer un risque, comme cela peut être le cas pour le renforcement de l’amarrage de certaines annexes semi rigides suspendues à des bossoirs qui sont moins favorables et donc moins protectrices.

Sans parler des conditions de garantie parfois prescrites et impossibles à mettre en œuvre en raison de la nature du bateau, comme le brêlage de défenses sur des catamarans à fort empattement.

Il serait en conséquence opportun que les contrats d’assurance stipulant des conditions de garantie relatives à des clauses de garantie cyclonique adaptent leurs contrats aux cas d’espèce et au navire assuré, en tenant compte également des normes européennes existantes, notamment sur les apparaux de mouillage et d’amarrage (nombre et dimensions des taquets d’amarrage ou résistance des amarres par exemple), ce qui n’est pas encore le cas.

De cette façon, l’interprétation seraient limitée et le plaisancier assuré, généralement de bonne foi dans la mise en sécurité de son bateau, n’aurait pas à saisir une juridiction pour faire interpréter en sa faveur les conditions de garantie de la clause cyclonique après s’être vu opposer un refus de garantie uniquement fondé sur une interprétation différente faite par l’assureur d’une clause qu’il a lui-même rédigée de façon souvent vague et imprécise.

Dans cette optique et en attendant un rapprochement jurisprudentiel clair des concepts d’exclusion et de conditions de garantie, ces précisions pourraient peut-être être formulées au terme des conditions particulières du contrat d’assurance de Navigation de Plaisance, leurs dispositions ayant vocation à préciser au cas par cas les conditions générales de la garantie dont bénéficie l’assuré.

Cette refonte serait d’autant plus nécessaire que les phénomènes météorologiques exceptionnels risquent fort de devenir récurrents à l’avenir en raison de l’évolution des conditions climatiques.